Jeux de mots

Il y a des mots somali qui, bien qu'ils soient identiques, prennent un sens différent lorsqu'ils sont utilisés dans le sud ou dans le nord du pays. En voici un nouvel exemple :

Le verbe "cunid" signifie "manger" au nord de la Somalie. Dans le sud, ce verbe veut dire également "cacher". Voici la mésaventure qui est arrivée à un Djiboutien qui voulait se faire passer pour un réfugié somalien, candidat à l'émigration :

Nous sommes dans l'avion, en partance pour le Canada, terre d'accueil de bon nombre de réfugiés somaliens. Notre djiboutien est assis à côté d'un somalien originaire du sud de la Somalie, lui-même candidat à l'émigration. Les deux hommes lient connaissance et en viennent à échanger des confidences sur les meilleurs moyens de réussir à passer l'immigration canadienne :

Somalien du sud : Il ne faut pas qu'on trouve sur toi des papiers qui montrent ton identité. Alors, avant de passer à l'immigration, "cun" (= cache) d'abord ton passeport !
Djiboutien : Es-tu sûr de ce que tu dis ?
Somalien du sud : Mais puisque je te le dis !

Car notre homme a compris "cun" (= avale) ! A demi assuré il s'enferme aux toilettes, déchire son passeport djiboutien et s'efforce tant bien que mal d'en avaler tous les morceaux, particulièrement indigestes, surtout la couverture cartonnée. Il arrive enfin au bout de sa tâche, à grand renfort de verres d'eau. Il ressort des toilettes.

Somalien du sud : Tu l'as bien caché ?
Djiboutien : Oui, ça n'a pas été facile, mais je l'ai avalé.

Le reste du voyage se passe sans encombre, jusqu'à l'arrivée, où le djiboutien est pris de violents maux d'estomac. Il est emmené aux urgences de l'aéroport où on lui fait une radio du ventre : c'est alors que les médecins découvrent avec stupeur des morceaux de cartons non digérés dans son estomac, avec une partie du mot "Djibouti" encore lisible !
Il fut rapatrié sur le vol suivant.

Quand on est candidat à l'émigration, il vaut mieux d'abord apprendre les langues étrangères, à commencer par la sienne !